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Affaire Seznec Discussion

Affaire Seznec Affaire Quéméneur-Seznec... Plusieurs livres ont été publiés et la BN a conservé la presse de l'époque, numérisée sur Gallica. Des auteurs ont eu le dossier entre les mains : D. Langlois, D. Seznec, B. Rouz, G. Penaud Ce n'est qu'en 2015 que j'ai eu connaissance de cette affaire par le livre de Denis Langlois : pour en finir avec l'affaire Seznec. J'ai voulu en savoir plus.

3 novembre 1924 : la plaidoirie de Me Kahn

3 novembre 1924 : la plaidoirie de Me Kahn

 

"On vous a dit que Seznec avait imaginé l’affaire des automobiles destinées à la Russie. C’est faux. Il n’était qu’un associé, la « cinquième roue du carrosse » comme il l’a dit lui-même. C’était Quemeneur qui avait la maîtrise de l’affaire, qui prenait les contacts, qui concluait les accords. La preuve, c’est que Seznec ne connaissait pas l’Américain qui avait proposé l’affaire. Il a été incapable de donner son nom et son adresse exacts. On a dit que Seznec avait intérêt à la disparition de Quemeneur. C’est faux. La promesse de vente ne pouvait se réaliser que si Quemeneur était vivant. Il n’y avait pas de reçu pour les 4 040 dollars et la famille n’aurait pas manqué – ce qu’elle a fait du reste – de contester la valeur d’un tel acte. Et cela Seznec, commerçant avisé, ne pouvait pas l’ignorer.

 

Mais en fait Quemeneur est-il mort ? Personne n’en sait rien. Pas plus M. l’avocat général que moi-même. La disparition n’est pas la mort. On a écarté un peu trop vite l’hypothèse de la fugue amoureuse ou autre. Dans cette ville de Quimper, un homme, M. Soulière, directeur du Service agricole du Finistère, a disparu récemment sans donner de ses nouvelles. Quelles secrètes raisons l’ont déterminé à ce départ ? Qu’est-il devenu ? Personne ne le sait. Il est toujours difficile de savoir ce qui se passe dans la tête d’un homme, même lorsqu’il est riche, honorablement connu et apparemment à l’aise dans la vie. Je voudrais à ce sujet vous rappeler l’affaire de M. de la Pipardière, qui, il y a bien longtemps, disparut brusquement. On accusa sa femme de l’avoir assassiné et on la jeta en prison. Et un beau jour il réapparut, insouciant.

 

Si demain cela se reproduisait pour Quemeneur, vous n’auriez pas d’excuses, car des témoins sont venus vous dire qu’ils l’avaient vu après la date de sa disparition. M. l’avocat général vous a dit que ce n’étaient pas de bons témoins et que leur parole n’avait aucune valeur. De quel droit ? Ils ont vu, ils ont prêté serment. Nous devons tenir compte de leurs déclarations.

 

 Nous avons parlé de Quemeneur. Parlons maintenant de Seznec. On a dit qu’il était couvert de dettes, poursuivi sans cesse par des créanciers. C’est faux. Quand, six mois après son arrestation, on a examiné sa situation financière, elle était encore largement bénéficiaire. En fait, Seznec avait seulement des problèmes de trésorerie et, s’il avait expliqué sa situation à son banquier, il aurait certainement obtenu un prêt. On a dit qu’il était insensible. J’ai regretté moi aussi de ne pas voir sur son visage la trace d’une émotion. Mais si vous saviez combien l’innocence se revêt parfois de maladresse ! Ne jugez jamais un homme sur son attitude ! Insensible, Seznec ? Mais on pourrait reprocher aux témoins la même chose ! Ils étaient 125 à l’accuser dont certains le connaissaient depuis longtemps et aucun, vous m’entendez aucun, n’a dit qu’il était un père de famille affectueux et attentif et que, s’il cherchait à gagner de l’argent, c’était surtout pour ses quatre enfants. Insensible, Seznec ? Mais vous n’avez donc pas vu ses yeux remplis de larmes lorsqu’il a aperçu sa vieille mère dans la salle !

 

 Quemeneur a-t-il été tué ? Je ne sais. Vit-il encore ? Je ne saurais répondre. On évoquait son souvenir, hier, jour des Morts. Songez aussi, messieurs, à tous ceux qui ont été victimes de l’erreur judiciaire, victimes de l’injustice es hommes. Songez à tous ceux qui sont morts de désespoir et d’effroi dans la torture d’un tourment immérité. Voici venir à vous leur troupe suppliante. Que cette vision douloureuse vous protège contre l’erreur et vous soit un avertissement. Malheur à vous, jurés bretons, si l’on peut dire un jour que vous avez condamné un innocent !

Cette plaidoirie de Me Kahn est rapportée dans le livre de Denis Langlois " L'affaire Seznec "

3 novembre 1924 : la plaidoirie de Me Kahn
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